DÉGÂTS LIES AU GEL : QUE FAIRE ?
Canalisations abîmées, dégât des eaux, compteur d’eau hors service… Le gel peut avoir de fâcheuses conséquences. Quels sont vos recours ?
Certains grelottent, d’autres pataugent. Les canalisations d’eau et les compteurs souffrent du grand froid. Et les mauvaises surprises ont surtout lieu au moment du dégel : canalisations rompues, compteur d’eau qui ne fonctionne plus, inondations, fuites provenant des voisins…
Votre assurance habitation va-t-elle prendre en charge le sinistre ? Si vous êtes locataire, les réparations sont-elles à votre charge ? Et si votre compteur d’eau a gelé, à qui incombe son remplacement ?
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Les dégâts subis me seront-ils indemnisés ?
Si la fuite ou la rupture de canalisation survient sur une installation extérieure, votre assureur n’interviendra pas, sauf exception. En effet, elles ne sont généralement pas couvertes par l’assurance multirisques habitation (MRH).
Attention à la non-prise en charge du sinistre
Concernant les installations intérieures, relisez bien les conditions générales et particulières de votre contrat MRH (le plus souvent dans la partie “dommages aux biens”, rubrique spécifique “gel” ou “dégât des eaux”). Elles peuvent imposer à l’assuré de prendre des mesures de protection particulières pendant la période hivernale.
Le non-respect de ces mesures entraîne des sanctions variables. Ce peut être l’absence complète de prise en charge du sinistre, ou un abattement (par exemple de 30 ou 50 %) sur l’indemnité versée, une part des frais restera alors à votre charge.
L’assurance ne couvre pas tout
Vous avez respecté les recommandations de votre assureur. Malgré cela, vous subissez un sinistre. Votre assurance couvre les dommages causés à vos biens, ainsi qu’à ceux de vos voisins, provenant du gel (ou du dégel) des canalisations, des appareils et des installations de chauffage situés à l’intérieur des bâtiments.
Si la fuite provient de chez l’un de vos voisins, tournez-vous vers votre assureur. Si le sinistre n’est pas trop élevé (1 600 € maximum), il vous indemnisera directement. Pour un sinistre plus grave, il traitera d’abord avec l’assureur de votre voisin, ce qui risque d’allonger le temps pour obtenir l’indemnisation.
En revanche, les dommages subis par la canalisation elle-même (ou plus largement par l’installation) ne sont souvent pas pris en charge. Cela signifie qu’en cas de rupture d’un tuyau entraînant une inondation, les biens endommagés par l’eau seront couverts, mais pas les frais liés au dégel de la canalisation ou à sa réparation. La plupart du temps, l’eau perdue ne vous sera pas non plus remboursée par l’assureur.
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Compteur gelé, compteur remplacé
Si votre compteur a gelé, il faudra le remplacer. Généralement, les services de distribution des eaux facturent les frais de ce remplacement à l’abonné car ils estiment que le compteur est sous la responsabilité de ce dernier.
Le règlement du service des eaux contient toujours une clause qui précise que l’abonné doit le protéger contre le gel. Cependant, si vous avez protégé votre compteur contre le gel et qu’il gèle malgré toutes vos précautions, son remplacement sera à la charge du service des eaux.
Reste à savoir en quoi consistent les précautions à prendre quand le règlement de service ne le précise pas. À titre d’indication, un arrêt de la cour d’appel de Rennes du 1er octobre 1991 a considéré qu’aucune faute ne pouvait être reprochée à l’abonné qui avait pris soin de fermer le robinet en son absence, de purger l’installation et d’entourer le compteur de matières isolantes.
Je suis locataire. Suis-je responsable ?
En tant que locataire, vous avez l’obligation de faire usage de votre logement en « bon père de famille », selon l’article 1728 du code civil, et d’« user paisiblement des locaux loués », selon l’article 7 b de la loi du 6 juillet 1989.
Vous devez respecter les consignes qui figurent dans le bail, dans le règlement intérieur de l’immeuble ou dans tout autre document porté à votre connaissance. En l’absence de consignes ou bien si ces dernières se révèlent imprécises, vous devez quand même vous montrer prévoyant en protégeant vos installations. Par exemple, si vous avez quitté votre logement plusieurs jours sans couper l’eau et sans vidanger les tuyaux, vous pourrez être accusé de négligence.
Le bailleur est parfois fautif
En revanche, vous n’êtes pas tenu de remédier à un vice de l’installation, par exemple des canalisations qui cheminent partiellement dans un local ouvert au froid. En effet, le bailleur reste responsable de ses propres fautes. Il peut être fautif si les installations du logement ne sont pas conçues pour répondre aux risques prévisibles dans la région (canalisations insuffisamment enterrées ou traversant des locaux non chauffés ou des combles non isolés), si les canalisations se révèlent trop vétustes ou bien s’il a été négligent.
Cependant, si votre logement subit des dégradations (canalisations éclatées, dégâts des eaux consécutifs au gel), vous êtes présumé responsable (article 7 c de la loi du 6 juillet 1989). Il vous faudra alors prouver qu’il y a eu faute du bailleur.
La demande de dommages et intérêts
Si par la faute du bailleur, vous vous retrouvez privé d’eau ou de chauffage, vous pouvez demander des dommages et intérêts pour privation de jouissance. Une locataire privée d’eau pendant deux mois a ainsi obtenu 750 € de dommages et intérêts pour son “préjudice d’agrément”.
Le bailleur arguait que le gel, cette année-là (janvier 1985), constituait une circonstance imprévisible. Mais ses arguments ont été balayés car l’expert avait constaté que l’appartement était « particulièrement exposé aux conséquences du gel en raison d’une installation en partie située sur les murs extérieurs et trop légère » (voir arrêt du 17 juillet 1987 de la Cour de cassation).
Le cas de force majeure ?
Vous pouvez éventuellement invoquer le fait que les dégradations sont la conséquence d’un cas de force majeure. Mais attention, le gel n’est pas en soi un cas de force majeure. Il le devient seulement s’il a été d’une intensité imprévisible compte tenu du climat habituel de la région et que les précautions que vous avez prises se sont révélées insuffisantes.
Vous pourriez alors être exonéré de votre responsabilité en tant que locataire. Si tel était le cas, le bailleur devrait alors remettre les équipements en état, mais serait dispensé de vous indemniser car pour lui aussi, le cas de force majeure s’appliquerait.
Toutefois, dans le cas de l’actuelle vague de froid, la force majeure sera difficile à plaider car la météo avait largement annoncé la chute des températures et émis de nombreux et réguliers bulletins d’alerte, notamment dans les régions peu habituées aux frimas.
Reste que si votre responsabilité est dégagée pour une raison ou une autre et que le bailleur refuse de réparer les dégâts, vous devrez saisir le tribunal d’instance de votre domicile. Le juge décidera alors, en tenant compte de la conception du logement et des conditions climatiques prévisibles, si la réparation incombe au bailleur ou à vous-même. En cas d’urgence, le tribunal peut être saisi en référé.
Quelles précautions dois-je prendre la prochaine fois ?
Pensez à bien protéger les installations extérieures avec des matériaux isolants. Certains assureurs imposent des contraintes supplémentaires sous peine de ne pas prendre en charge tout ou partie des dommages.
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Les obligations imposées par les assureurs
Voici des exemples de clauses que l’on trouve dans les contrats d’assurance multirisques habitation :
- En cas d’absence supérieure à trois ou quatre jours, quelle que soit la saison, il est demandé de couper l’eau de votre logement (robinet d’arrêt près du compteur).
- En cas d’inhabitation et si les locaux ne sont pas chauffés normalement : pendant les périodes de gel (température inférieure à 0 °C pendant plus de 24 heures), de grand froid, ou tout simplement entre novembre et avril, vous devez vidanger les conduites, les réservoirs et l’installation du chauffage central, ou bien utiliser des produits antigel.
- Pendant les périodes de grand froid, certains contrats imposent d’arrêter la circulation d’eau froide pendant la nuit, et cela même si les locaux sont chauffés et que vous êtes présent.
Du polystyrène, mais pas de laine de verre
Concernant votre compteur d’eau, là encore la vigilance est de mise car, que vous soyez locataire ou propriétaire, il est sous votre responsabilité. Les distributeurs d’eau ne tarissent pas en conseils de prévention.
Quand le compteur est situé dans un local non chauffé (cave, garage…), il est recommandé de l’isoler ainsi que les tuyaux avec une gaine isolante. S’il est enterré à l’extérieur, calfeutrez-le tout comme les canalisations exposées avec des plaques de polyuréthane ou de polystyrène extrudé. N’utilisez jamais de matériaux absorbant l’humidité (paille, textile, papier, laine de verre ou de roche, etc.)
Certains distributeurs conseillent même, en cas de gel intense et prolongé, de laisser couler en permanence un filet d’eau dans votre évier afin d’assurer une circulation constante dans les canalisations.
Source: 60 Millions